Marketing de disruption, personal branding et conscience circulaire

par | 19 Avr 2016

Qu’est-ce que la disruption ?

Une stratégie marketing de disruption (ou disruptive) commence par identifier les conventions et schémas culturels liés au secteur d’activité de l’entreprise ou de la marque à promouvoir. Le concept marketing de disruption a été créé en 1992.(1)

« L’innovation disruptive est une innovation de rupture, par opposition à l’innovation incrémentale, qui se contente d’optimiser l’existant » (Jean-Marie Dru, inventeur du concept de disruption).(1) L’idée fondamentale est qu’une communication basée sur ces approches traditionnelles aura peu ou pas d’effet en termes d’accroissement de notoriété et de développement. La créativité consiste dès lors à trouver le moyen de créer une rupture de forme ou un déplacement de sens par rapport aux procédés marketing habituellement utilisés pour le type de produits ou services concernés.

L’image spécifique et unique résultant de cette communication décalée met l’entreprise ou la marque en perspective, recréant ou réaffirmant son identité en la faisant sortir du lot. L’innovation disruptive peut aller jusqu’à changer radicalement l’orientation de l’entreprise pour développer de nouveaux marchés.

L’intention étant d’apporter un souffle nouveau à la structure, il est fréquent que les entreprises fassent appel à des consultants extérieurs pour les accompagner dans leur démarche de projet.

Marketing de disruption et personal branding : crises personnelles ?

Disruption vs Personal branding : l’entreprise ou la marque (ré)affirme son identité en revendiquant une personnalité originale selon une démarche marketing qui n’est pas sans rappeler certaines tendances de développement personnel basées sur le gimmick « Change ton approche ! » ; tandis que l’individu, à travers notamment une utilisation des réseaux sociaux qui tend à gommer la séparation entre l’intime et le global, se donne à voir comme une marque incarnée.

En extrapolant à peine, on pourrait dire que, par une sorte d’inversion des rôles ou de mélange des genres, l’entreprise (ou la marque) joue la carte de la transformation personnelle tandis que l’individu se diffuse à travers une image corporate, devenant lui-même le produit et son support de diffusion, à la fois sujet et objet.

Dans quelle mesure ces approches marketing reflètent-elles un « nouveau paradigme » – si tant est que le terme ait encore un sens ? Chacun cherche son changement ou une meilleure version de lui-même en déplaçant d’abord son point de vue. La vision qui en résulte, pour différente ou inhabituelle relativement, peut-elle être qualifiée de nouvelle ? Combien de temps une approche neuve conserve-t-elle sa fraîcheur ? René Char a écrit que « L’acte est vierge, même répété ». La rupture disruptive, même si elle n’implique pas nécessairement de faire tabula rasa de l’existant, suppose de prendre position ou de passer à l’action d’une manière radicalement nouvelle. Comment la transformation ainsi suscitée s’inscrit-elle dans le temps : s’agit-il d’un changement direct (à réitérer) ou d’une (nouvelle) voie progressive ?

Vers une communication philosophe

Autorisons la pensée à faire un bond. L’économique et le social, nourris des possibilités infinies offertes par le numérique et les technologies, rencontrent ici le philosophique en conduisant à des questionnements archaïques sur l’âme et la conscience.

À l’aube du XIXe siècle, Heinrich Von Kleist conclut ainsi le petit bijou qu’est Sur le théâtre de marionnettes(2) (le livre parle d’une analyse du mouvement par un danseur au sommet de sa gloire, suivant une théorie qui aboutit à une vision métaphysique) :

« (…) [Comme] l’intersection de deux lignes situées d’un même côté d’un point se retrouve soudain de l’autre côté, après avoir traversé l’infini, ou comme l’image d’un miroir concave revient soudain devant nous, après s’être éloignée à l’infini : ainsi revient la grâce, quand la conscience est elle aussi passée par un infini ; de sorte qu’elle apparaît sous sa forme la plus pure dans cette anatomie humaine qui n’a aucune conscience, ou qui a une conscience infinie, donc dans un mannequin, ou dans un dieu.

– Par conséquent, lui dis-je un peu songeur, nous devrions manger une fois encore du fruit de l’Arbre de la Connaissance, pour retomber dans l’état d’innocence ?

– Sans aucun doute, me répondit-il ; c’est le dernier chapitre de l’histoire du monde. »(2)

L’histoire montre qu’aucun chapitre n’est vraiment le dernier. Revenons à nos moutons disruptifs. Combien de temps la disruption peut-elle rester disruptive ? Quid de la disruption de la disruption ? Le système prend des allures de plongeon vertigineux dans un terrier dont on finira pourtant bien par rencontrer le fond. Que trouverons-nous alors de l’autre côté du miroir ?


(1) Pour en savoir plus sur le concept de disruption : http://m.nouvelobs.com/economie/20160122.OBS3214/le-concept-de-disruption-explique-par-son-createur.html

(2) Heinrich Von Kleist, Sur le théâtre de marionnettes, 1810, Éditions Mille et une nuits. Le texte intégral est disponible sur http://archives.skafka.net/alice69/doc/kleist_marionnette.htm

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